La loi Darmanin sur l'immigration a été votée par le Sénat et l’Assemblée nationale mardi 19 décembre 2023 au soir. Il s'agit d'un texte tellement à droite qu'il a été voté par le Rassemblement national qui s'est félicité d'une victoire idéologique. Pour donner une idée de l'impact qu'aura ce texte, s'il est validé par le Conseil constitutionnel, voici un petit résumé des mesures qui vont avoir des conséquences immédiates sur la vie des migrants :
- Le conditionnement des aides sociales à une durée de résidence minimale en France qui dépend du statut de la personne au niveau de l'emploi. Pour des prestations comme les allocations familiales un délai de 5 ans est prévu pour ceux qui ne travaillent pas et de 30 mois pour les étrangers en situation d'emploi. Pour l'Aide Personnalisée au Logement (APL) la condition de résidence est de 5 ans pour les étrangers sans emploi et de 3 mois pour ceux qui ont un emploi.
- La restriction du droit au séjour pour soin. Il ne pourra désormais plus être accordé que si le traitement approprié n'existe pas dans le pays d'origine sans prendre un compte la possibilité effective d'y avoir accès.
- Réforme de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) qui traite les demandes rejetées par l'Ofpra. La décision sera maintenant prise par un juge unique et non plus trois ce qui risque de restreindre le droit d'asile. Les agents de la Cour étaient d'ailleurs en grève fin novembre, notamment contre cette réforme.
- Systématisation des OQTF (Obligation de quitter le territoire français) lorsque l'Ofpra rejette une demande d'asile, sans attendre le recours devant la CNDA.
- Fin de la prise en charge médicale pour les étrangers définitivement déboutés du droit d'asile.
- Légalisation des OQTF contre certaines catégories d'étrangers qui en étaient auparavant protégés : personnes arrivées avant l'âge de 13 ans, ceux ayant des liens familiaux en France (parent d'un enfant français, conjoint de français), malades devant être pris en charge médicalement, personnes résidant en France depuis plus de 20 ans.
- Exclusion du dispositif d'hébergement d'urgence des étrangers visés par une OQTF.
- Rétablissement du délit de séjour irrégulier passible d'une peine de 3750€ d'amende et de trois ans d'interdiction de territoire.
- Durcissement des conditions du regroupement familial avec notamment le passage de la durée de séjour du demandeur de 18 à 24 mois et l'introduction de conditions de ressources. Les membres de la famille devront également justifier de leur connaissance de la langue française.
- Instauration d'une caution pour les étudiants étrangers visant à couvrir le coût d'une éventuelle expulsion. De nombreuses universités se sont indignées de ce dispositif.
Notons en outre l'instauration de quotas migratoires, la fin de l'automaticité d'obtention de la nationalité française à la majorité pour les personnes nées en France de parents étrangers ainsi que l'introduction de la déchéance de nationalité pour les binationaux condamnés pour homicide volontaire contre toute personne dépositaire de l'autorité publique. Et n'oublions pas le conditionnement d'une partie de l'aide au développement à la délivrance des laissez-passer consulaires nécessaires aux expulsions.
Quant à la fameuse régularisation de travailleurs dans les métiers "en tension", il s'agit de titres de séjour précaires (un an) attribués à la discrétion des préfets. Comment peut-on parler d'intégration quand les personnes ne peuvent se projeter sur le long terme sur leur présence sereine sur le territoire ?
Cette loi est une honte. Elle ne va qu'augmenter les souffrances de personnes déjà en grandes difficultés. Et elle ne ralentira en aucune manière les flux migratoires. Car rappelons-le : personne ne traverse la Méditerranée et le Sahara au risque de sa vie pour venir toucher les aides sociales. Ces personnes quittent leur pays parce qu'elles n'ont pas le choix, elles fuient la guerre, la misère et les persécutions. Cette loi ne les dissuadera pas de partir. Mais elle va rendre leur vie ici encore plus difficile. Pourquoi ?
La Coordination des Sans Papiers 75 organise une manifestation aujourd'hui, vendredi 22 décembre à 16h entre République et Châtelet. Soyons-y nombreux pour manifester notre indignation et notre solidarité !
Une pétition est également en ligne pour demander au Président de ne pas promulguer la loi.